Perspectives sur les possibilités de publications pharmaceutiques au Canada


Guillaume Hébert , Assistant de recherche , Marie-Éve Tremblay , Assistante de recherche , Cynthia Tanguay , B. Sc., M. Sc. , Assistante de recherche , Jean-François Bussières , B. Pharm., M.Sc., FCSHP , Chef

Le cadre réglementaire de l’exercice de la pharmacie au sein de chaque province canadienne prévoit l’obligation pour les pharmaciens du maintien de leurs compétences1. Afin d’atteindre cet objectif, les pharmaciens lisent notamment des journaux pharmaceutiques qui paraissent grâce à la contribution de certains de leurs pairs et d’autres professionnels. Il existe peu de données sur la publication scientifique par les pharmaciens26. Au Canada, on recense environ 30 000 pharmaciens, dont 75% exercent en pratique communautaire, 20% en établissements de santé et 5% dans d’autres sphères7. Nous nous sommes intéressés à l’évolution de la possibilité de publier dans cinq revues pharmaceutiques canadiennes.

Il s’agit d’une étude descriptive rétrospective des publications dans les cinq principaux journaux pharmaceutiques canadiens en 2001, 2005 et 2009. Deux journaux de pratique hospitalière ( Pharmactuel, Canadian Journal of Hospital Pharmacy/Journal canadien de la pharmacie hospitalière ) et trois journaux de pratique communautaire ( Canadian Pharmacists Journal/Revue des pharmaciens du Canada, Pharmacy Practice, Québec Pharmacie ) ont été évalués. Tous les numéros de chaque année, y compris les suppléments numérotés, ont été inclus, mais les encarts et publireportages non numérotés en étaient exclus. L’analyse a été réalisée par un assistant de recherche en pharmacie avec revalidation de la codification par un second assistant. Une valeur de p inférieure à 0,05 était considérée significative. Les données ont été analysées avec PASW Statistics 17 (SPSS Inc., Chicago [Illinois]).

Le nombre moyen de numéros publiés annuellement et le nombre moyen de pages par numéro ont été comparés par année et par type de revues (c.-à-d. pratique hospitalière c. pratique communautaire) (tableau 1). Chaque page était catégorisée selon quatre types de contenu, soit scientifique, administratif, publireportage et publicité. Une page était incluse dans une catégorie si plus de 50% du contenu répondait au critère. La proportion du nombre de pages publiées par type de contenu a été comparée par année et par type de revues (tableau 1).

Tableau 1.  Description du contenu par numéro de cinq journaux pharmaceutiques canadiens*


 

Un nombre total de 115 numéros a été analysé (8310 pages), soit 73% provenant de trois journaux de pratique communautaire et 27% de deux journaux de pratique hospitalière. On a noté une diminution globale de 10% du nombre total de pages publiées par année de 2001 à 2009 (2864 pages c. 2566). Les journaux en pratique communautaire étaient principalement responsables de cette diminution du nombre total de pages publiées par année (baisse relative de 37% pour Québec Pharmacie , de 32% pour Revue des pharmaciens du Canada et de 24% pour Pharmacy Practice ) tandis qu’une augmentation du nombre total de pages publiées est observée pour les journaux en pratique hospitalière (hausse relative de 151% pour Pharmactuel et de 38% pour Journal canadien de la pharmacie hospitalière ). Globalement, la proportion du nombre de pages de contenu scientifique par numéro a augmenté de 2001 à 2009 (50% c. 56%, p = 0,011) tandis que la proportion du nombre de pages de contenu administratif par numéro a diminué (14% c. 10%, p = 0,052). Cette variation était principalement liée à une modification de la répartition des catégories, notamment une augmentation de la proportion du contenu scientifique de 2001 à 2009 pour les journaux en pratique hospitalière (57% c. 76%, p < 0,001).

Le nombre absolu d’articles publiés (contenu scientifique) a diminué : 501 articles pour l’ensemble des journaux en 2001 (420 en pratique communautaire c. 81 en pratique hospitalière), à 449 en 2005 (363 en communautaire c. 86 en hôpital) et 399 en 2009 (252 en communautaire c. 147 en hôpital). Le nombre moyen d’auteurs par article (contenu scientifique) a augmenté, de 1,2 en 2001 à 1,4 en 2005 et à 1,7 en 2009. Enfin, on a observé entre les trois années une proportion similaire du nombre d’articles écrits en français (37% en 2001, 31% en 2005 et 38% en 2009).

Cette étude descriptive a mis en évidence une diminution de 10% du nombre total de pages de cinq journaux pharmaceutiques canadiens et une diminution du nombre absolu d’articles scientifiques publiés de 2001 à 2009 dans cinq revues pharmaceutiques canadiennes. Cette baisse ne s’est toutefois pas fait sentir dans les journaux en pratique hospitalière. Ces baisses peuvent être attribuables à une variation de revenus publicitaires, à la disponibilité des auteurs et des manuscrits soumis ou sollicités, à l’augmentation de publireportages publiés à l’extérieur de ces revues, etc.

Peu de journaux pharmaceutiques sont indexés dans PubMed (p. ex. American Journal of Health-System Pharmacy, The Annals of Pharmacotherapy, Pharmacotherapy, International Journal of Pharmacy Practice, Annales Pharmaceutiques Françaises ) et aucun journal de pharmacie canadien n’est indexé. Il faut mentionner que le Journal canadien de la pharmacie hospitalière était indexé dans PubMed de 1975 à 1995 et que les numéros publiés depuis 2009 sont maintenant disponibles dans PubMed Central.

Les mises à niveau des programmes de formation en pharmacie8 et des critères d’embauche dans le réseau hospitalier canadien9 vont de pair avec le maintien et le développement de possibilités de rédaction d’articles scientifiques par et pour les pharmaciens; dans ce contexte, la réduction du nombre de pages publiées nous apparaît préoccupante. S’il est vrai que les pharmaciens canadiens publient dans une variété de journaux scientifiques et pas seulement pharmaceutiques, il nous apparaît souhaitable de préserver ces lieux de publications et d’assurer, en nombre absolu, et en part relative, une pérennité à publication scientifique en pharmacie.

Références

1.  Berry M. Canadian pharmacy law . Aurora (ON) : Aurora Professional Press – Canada Law Book; 2010.

2.  Thompson DF, Segars LW. Publication rates in U.S. schools and colleges of pharmacy, 1976–1992. Pharmacotherapy 1995;15(4):487–494.
pubmed  

3.  Coleman CI, Schlesselman LS, Lao E, White CM. Number and impact of published scholarly works by pharmacy practice faculty members at accredited US colleges and schools of pharmacy (2001–2003). Am J Pharm Educ 2007;71(3):44.
cross-ref  pubmed  pmc  

4.  Touchette DR, Bearden DT, Ottum SA. Research publication by pharmacist authors in major medical journals: changes over a 10-year interval. Pharmacotherapy 2008;28(5):584–590.
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5.  Dotson B, McManus KP, Zhao JJ, Whittaker P. Authorship and characteristics of articles in pharmacy journals: changes over a 20-year interval . Ann Pharmacother 2011;45(3):357–363.
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6.  Macgregor P. Éducation et recherche. Dans : Babich M, Bussières JF, Hall K, Harding J, Johnson N, Lefebvre P, et al., comité de rédaction. Rapport annuel 2005–2006 pharmacies hospitalières canadiennes. Eli Lilly; 2007. p. 93–96. Publié au www.lillyhospitalsurvey.ca/hpc2/content/2006_report/educationF.pdf. Consulté le 20 octobre 2011.

7.  Les pharmaciens au Canada 2009. Ottawa (ON) : Institut canadien d’information sur la santé; 2009. Publié au www.cihi.ca/CIHI-ext-portal/pdf/inter-net/INFO_PC_18NOV10_PDF_FR. Consulté le 25 octobre 2011.

8.  CPhA position statement on a doctor of pharmacy degree as an entry-level to practice. Ottawa (ON) : Association des pharmaciens du Canada; 2009. Publié au www.pharmacists.ca/content/about_cpha/who_we_are/policy_position/pdf/PharmD%20Entry%20Level.pdf. Consulté le 22 octobre 2011.

9.  CSHP 2015 – targeting excellence in pharmacy practice. Ottawa (ON) : Société canadiennes des pharmaciens d’hôpitaux; 2011. Publié au www.cshp.ca/programs/cshp2015/index_e.asp. Consulté le 22 octobre 2011.
pubmed  pmc  


Unité de recherche en pratique pharmaceutique, CHU Sainte-Justine, Montréal (Québec)

Guillaume Hébert est aussi candidat au DPharm à la Faculté des sciences pharmaceutiques et biologiques à l’Université Paris V René Descartes, Paris (France). Marie-Éve Tremblay est aussi candidate au DPharm à la Faculté de pharmacie, Université de Montréal, Montréal (Québec). Jean-François Bussières est aussi Chef de Département de pharmacie au CHU Sainte-Justine et professeur titulaire de clinique, Faculté de pharmacie, Université de Montréal, Montréal (Québec). ( Return to Text )

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Canadian Journal of Hospital Pharmacy , VOLUME 65 , NUMBER 3 , May-June 2012