Conformité du circuit du médicament dans les unités de soins et les cliniques externes : étude observationnelle transversale au sein d’un établissement universitaire de 500 lits


Amélie Chabrier, Pauline Rault, Suzanne Atkinson, Jean-François Bussières

RÉSUMÉ

Contexte

En établissement de santé, le circuit du médicament est complexe, puisqu’il compte plus de 50 étapes. Pour évaluer la conformité du circuit du médicament de notre établissement, nous avons mis en place un processus annuel d’audit.

Objectifs

L’objectif principal vise à décrire la conformité de certaines étapes du circuit du médicament (principalement la gestion des médicaments) aux unités de soins et dans les cliniques externes d’un centre hospitalier universitaire mère-enfant. L’objectif secondaire consiste à comparer les résultats à ceux des audits précédents.

Méthodes

Il s’agit d’une étude descriptive observationnelle transversale réalisée à l’été 2018 dans les unités de soins (n = 34) et les cliniques externes (n = 28) de l’établissement. Les données ont été recueillies à partir d’une grille d’audit.

Résultats

En 2018, le taux de conformité de l’ensemble des unités de soins aux critères mentionnés dans la grille d’audit variait de 32 % à 100 %. Par rapport à l’année précédente, le taux de conformité à 30 critères est demeuré inchangé et celui à quatre critères s’est détérioré. La conformité à 35 % des critères (12/34) était totale à plus de 85 %. En 2018, le taux de conformité de l’ensemble des cliniques externes aux critères mentionnés dans la grille d’audit variait de 0 % à 100 %. Le taux de conformité à un critère s’est amélioré, celui à 21 critères est demeuré inchangé et celui à deux critères s’est détérioré. La conformité à 32 % des critères (9/28) était totale à plus de 85 %. Trente-cinq recommandations ont été formulées au comité pharmacie-soins infirmiers et un rapport personnalisé a été transmis aux gestionnaires.

Conclusions

Cette étude descriptive observationnelle transversale décrit le degré de conformité du circuit du médicament relatif à la gestion des médicaments, principalement dans les unités de soins et les cliniques externes. Cette démarche originale à l’initiative du Département de pharmacie a abouti à la formulation de 35 recommandations au comité pharmacie-soins infirmiers, ce qui a permis d’améliorer la sécurité du circuit du médicament dans les unités de soins et les cliniques externes.

MOTS CLÉS: circuit du médicament, audit, pharmacie, unités de soins, cliniques externes

ABSTRACT

Background

In the hospital setting, the medication-use system is complex, having more than 50 steps. To assess the compliance of the study organization’s medication-use system with established criteria, an annual audit process was developed.

Objectives

The primary objective was to describe the compliance of certain steps in the medication-use system (mainly medication management) in care units and outpatient clinics of a mother and child university hospital centre. The secondary objective was to compare the current results with those of previous audits.

Methods

This cross-sectional descriptive observational study was carried out in summer 2018 in patient care units (n = 34) and outpatient clinics (n = 28) of the study hospital. Data were collected according to an audit matrix.

Results

In 2018, the rate of compliance with audit criteria varied between 32% and 100% for the patient care units. Relative to the previous year, the compliance rate remained unchanged for 30 criteria and worsened for 4 criteria. For 35% of the criteria (12/34), compliance was greater than 85%. In 2018, the rate of compliance with audit criteria varied between 0% and 100% for the outpatient clinics. The compliance rate increased for one criterion, remained unchanged for 21 criteria, and worsened for 2 criteria. For 32% of the criteria (9/28), compliance was more than 85%. Thirty-five recommendations were made to the pharmacy and nursing care committee, and a personalized report was sent to managers.

Conclusions

This cross-sectional descriptive observational study reports the degree to which the medication-use system complies with medication management criteria, mainly in patient care units and outpatients’ clinics. This original approach from the Pharmacy Department led to the formulation of 35 recommendations to the pharmacy and nursing care committee, which helped to improve the safety of the medication-use system in patient care units and outpatient clinics.

KEYWORDS: medication-use system, audit, pharmacy, patient care units, outpatient clinics

INTRODUCTION

En établissement de santé, le circuit du médicament est complexe et il comporte plus de 50 étapes, de la sélection d’un médicament à sa prescription, à sa préparation, à sa validation pharmaceutique, à l’administration aux patients et à l’élimination des quantités résiduelles1. Ce circuit est encadré par des lois fédérales et provinciales et de nombreux documents provenant de différents organismes (p. ex. Santé Canada, Agrément Canada, Ordre des pharmaciens du Québec).

De nombreux intervenants participent au circuit du médicament, dont les prescripteurs (p. ex. médecins, pharmaciens, infirmières praticiennes spécialisées), les personnes responsables de la validation et les préparateurs (p. ex. pharmaciens, assistants techniques en pharmacie, infirmières), les administrateurs de doses (p. ex. infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes), les personnes responsables de l’élimination des doses (p. ex. préposé, personnel de l’hygiène et salubrité)1.

Chaque dose de médicament utilisée pour un patient comporte un risque de survenue d’événements indésirables (c.-à-d. effet indésirable ou erreur médicamenteuse). Afin de limiter les risques d’événements indésirables prévisibles, plusieurs organismes d’agrément proposent un cadre normatif visant à sécuriser le circuit du médicament24. Ce cadre normatif comporte des pratiques organisationnelles requises et plusieurs normes. Les critères concernés par ce cadre requièrent la mise en place d’un circuit du médicament bien défini, avec des politiques et des procédures écrites, des rôles explicites, un processus sécuritaire et de bons outils permettant d’assurer la traçabilité des gestes posés.

Bien que le circuit du médicament concerne le Département de pharmacie, une portion importante de ce circuit se déroule dans les unités de soins et dans les cliniques externes des établissements de santé. Afin de promouvoir la conformité du circuit du médicament au sein de son institution, un établissement de santé a mis en place un processus annuel d’audit de ce circuit1.

MÉTHODE

Il s’agit d’une étude descriptive observationnelle transversale.

Objectifs

L’objectif principal de cette étude vise à décrire la conformité d’une sélection d’étapes du circuit du médicament (principalement la gestion du médicament) applicable aux unités de soins et aux cliniques externes d’un centre hospitalier universitaire mèreenfant. L’objectif secondaire de cette étude consiste à comparer les résultats des audits des unités de soins et des cliniques externes à ceux de l’année précédente.

Lieu et critères d’inclusion

L’étude s’est déroulée dans un centre hospitalier universitaire mère-enfant de 500 lits durant l’été 2018. Deux assistantes de recherche ont procédé à l’évaluation de la conformité du circuit du médicament par observation directe complétée d’un court entretien avec l’assistante-infirmière-chef de chaque unité de soins ou de clinique externe. Toutes les unités de soins (n = 22) et toutes les cliniques externes qui ont des médicaments en réserve (n = 22) ont été incluses dans l’étude.

Grille de critères de conformité

En 2012, une équipe d’un département de pharmacie a conçu une grille de critères de conformité du circuit du médicament (n = 25 critères) pour la tenue d’un audit annuel à partir du cadre juridique et normatif en vigueur complété d’une revue documentaire5. Au fil des années, cette grille s’est adaptée à l’évolution du cadre juridique et normatif et des besoins de l’établissement6. Durant l’audit du 9 juillet au 10 août 2018, la grille des unités de soins comportait 34 critères et celle des cliniques externes, 28 critères. La grille était divisée en trois thèmes : a) entreposage, réfrigération et gestion des déchets (n = 12 critères) b) chariots unidoses et cabinets (n = 6 critères) et c) documentation (n = 11 critères). L’annexe 1 (disponible au https://www.cjhp-online.ca/index.php/cjhp/issue/view/196/showToc) présente la grille de critères et les tests de conformité.

Tenue de l’audit

Les deux assistantes de recherche se sont présentées ensemble dans chaque unité de soins ou clinique externe pour procéder à l’audit. Le personnel des différentes unités et cliniques n’avait pas été averti de la réalisation de l’audit. La première partie de l’audit reposait sur une observation directe des différentes zones de stockage des médicaments. La seconde partie de l’audit reposait sur un entretien avec l’assistante-infirmière-chef de chaque unité afin de vérifier ses connaissances des outils développés par la pharmacie et de sa pratique. L’ensemble des réponses ont été recueillies par écrit à partir de la grille de collecte des données. De plus, la durée de la réalisation de l’audit et de l’analyse avec les assistantes de recherche et les pharmaciens concernés a été prise en compte.

Rapport personnalisé par unité de soins ou clinique externe

Les résultats ont ensuite été retranscrits dans un rapport de synthèse destiné à chaque gestionnaire de l’unité de soins ou de la clinique externe. Le rapport a été revu par la chef adjointe aux services pharmaceutiques et discuté avec les pharmaciens cliniciens de chaque lieu avant d’être remis au gestionnaire infirmier. Chaque rapport était personnalisé et comportait une suggestion d’actions correctrices à mettre en place.

Analyse des résultats

Les données ont été saisies dans un chiffrier (Excel, Microsoft, Seattle [Washington]) et analysées dans le logiciel SPSS (IBM SPSS Statistics for Windows, version 24.0, publié en 2016; IBM Corporation, Armonk [New York]). Les deux assistantes de recherche devaient indiquer la cote qui correspondait à chaque critère : C (Conforme), Cr (Conforme avec recommandations), NC (Non conforme avec recommandations), NA (Non applicable). La conformité à un critère était considérée comme totale lorsque 100 % des observations faites étaient conformes ; la conformité à un critère était considérée comme presque totale avec recommandations lorsque plus de 85 % des observations étaient conformes (il s’agit généralement d’un oubli, d’un comportement isolé, d’un élément portant à interprétation) ; la non-conformité à un critère correspondait à une conformité inférieure à 85 % des observations. Les cotes et commentaires ont ensuite été révisés par la chef adjointe aux services pharmaceutiques. Ils prenaient en compte l’activité des unités de soins ou des cliniques externes et de l’ensemble du processus.

Le taux de conformité à chaque critère a été calculé comme suit : nombre total de critères portant la mention « conforme » + nombre total de critères portant la mention « conforme avec recommandations » / nombre total de critères observés. La mesure de l’évolution de la conformité a été obtenue par comparaison des taux de conformité de 2017 à ceux de 2018 à l’aide d’un test de χ2 (test exact de Fisher). De plus, pour chaque année, nous avons calculé le nombre de critères auxquels le taux de conformité était supérieur ou égal à 85 %, seuil défini arbitrairement.

Une valeur de p inférieure à 0,05 était considérée statistiquement significative.

RÉSULTATS

Les assistantes de recherche ont reçu 88 heures de formation ventilées de la manière suivante : formation des assistantes de recherche à l’audit (5 heures), tenue de l’audit (64 heures), rédaction des rapports (10 heures), analyse (3 heures) et rétroaction au personnel soignant (6 heures). La grille d’évaluation étant reprise des années précédentes, son temps de conception n’est donc pas pris en compte.

De façon globale, en 2018, le taux de conformité à 12 des 34 critères applicables aux unités de soins était égal ou supérieur à 85 % et à 9 des 28 critères applicables aux cliniques externes. Entre 2017 à 2018, on note une différence de conformité significative à seulement quatre des 34 critères dans les unités de soins et à seulement trois des 28 critères dans les cliniques externes. Le taux de conformité à une majorité de critères est demeuré inchangé.

Le tableau 1 présente le profil du taux de conformité à chaque critère de l’« Entreposage » dans les unités de soins et les cliniques externes de 2017 à 2018.

Tableau 1 Profil du taux de conformité à chaque critère de l’« Entreposage » dans les unités de soins et les cliniques externes de 2017 à 2018


 

Le tableau 2 présente le profil du taux de conformité à chaque critère de « Chariots et cabinets » aux unités de soins seulement, de 2017 à 2018. Ces critères ne s’appliquent qu’aux unités de soins.

Tableau 2 Profil du taux de conformité à chaque critère de « Chariots et cabinets » aux unités de soins de 2017 à 2018


 

Le tableau 3 présente le profil du taux de conformité à chaque critère de « Documentation » aux unités de soins et aux cliniques externes de 2017 à 2018.

Tableau 3 Profil du taux de conformité à chaque critère de « Documentation » aux unités de soins et aux cliniques externes de 2017 à 2018


 

À la lumière de l’audit mené en 2018, 35 recommandations ont été formulées et transmises au comité pharmacie-soins infirmiers. Les recommandations types suivantes ont été formulées à chaque unité de soins ou clinique externe seulement lorsque cela était applicable. Le tableau 4 présente le profil des recommandations générales découlant de l’audit mené en 2018.

Tableau 4 Profil des recommandations générales découlant de l’audit mené en 2018


 

Les rapports personnalisés ont été validés avec les pharmaciens et transmis aux gestionnaires dans les 14 semaines après l’audit. L’annexe 2 (disponible au https://www.cjhp-online.ca/index.php/cjhp/issue/view/196/showToc) présente un exemple de rapport personnalisé pour une unité de soins.

DISCUSSION

Cette étude décrit un exemple concret de la mise en place d’un processus structuré et annuel d’évaluation de la conformité d’une partie du circuit du médicament au sein d’un établissement de santé. On trouve peu d’exemples d’audits similaires dans la littérature scientifique711. Des équipes de recherche ont également mené des travaux similaires au bloc opératoire12,13. Selon les études recensées, les grilles de conformité proposées comportent un nombre variable de thèmes (de 5 à 21) et de critères (de 12 à 164)10,11. Il est difficile de comparer nos résultats à ceux de ces études, compte tenu des différents critères utilisés, des particularités propres à chaque circuit du médicament spécifique à chaque établissement de santé (p. ex. aménagement, rôles, façons de travailler) et approches d’audit utilisées. De façon générale, le taux de conformité varie beaucoup d’un critère à l’autre et d’une étude à l’autre.

En vertu de la norme sur la gestion des médicaments publiée par Agrément Canada, « un comité interdisciplinaire est responsable de la gestion du système des médicaments »4. En vertu des Standards de pratique de l’Ordre des pharmaciens du Québec, « le pharmacien s’assure de l’efficience et de la sécurité du circuit du médicament »14. Nous pensons que le pharmacien est le mieux placé pour assurer la bonne gouverne du circuit du médicament dans son ensemble, compte tenu des obligations juridiques et normatives, de son expertise, de sa vision globale du circuit du médicament et de sa présence au sein de l’établissement. Cette étude décrit une initiative pharmaceutique originale, arrimée au travail du personnel infirmier, dans le but de sécuriser le circuit du médicament et d’offrir un outil de rétroaction structuré et pérenne. Le résultat de cet audit est notamment utilisé comme preuve d’évaluation et de suivi lors des visites d’Agrément Canada.

De 2017 à 2018, on note très peu de différence statistiquement significative du taux de conformité à chaque critère (c.-à-d. détérioration de la conformité à trois critères dans les unités de soins et à deux critères dans les cliniques externes et amélioration de la conformité à un critère dans les cliniques externes).

En ce qui concerne l’entreposage entre 2017 et 2018, la conformité aux critères d’au moins 85 % est passée de 9/12 à 5/12 dans les unités de soins (trois différences statistiquement significatives incluant l’absence d’électrolytes concentrés) et de 5/12 à 6/12 dans les cliniques externes (une seule différence statistiquement significative concerne la présence de poubelle adaptée aux politiques et procédures). Les électrolytes concentrés examinés avaient été servis au nom des patients selon les règles d’exception en vigueur, mais ils n’avaient pas été remisés dans un endroit conforme. Notons aussi que, de 2017 à 2018, des changements de fournisseur et de type de poubelles à déchets pharmaceutiques avaient lieu pendant la tenue de l’audit.

En ce qui concerne les chariots et cabinets, la conformité aux critères, qui était d’au moins 85 %, est passée de 3/6 à 1/6 dans les unités de soins (aucune différence statistiquement significative) de 2017 à 2018.

En ce qui concerne la documentation, la conformité aux critères est restée inchangée, soit 6/16 critères dans les unités de soins (une seule différence statistiquement significative relative à la présence de FOPR-I conforme) et 3/16 critères (deux différences statistiquement significatives relatives à la connaissance de la page d’accès à deux items types sur l’intranet et à l’utilisation systématique de la feuille de contact pour faire une demande à la pharmacie) dans les cliniques externes. Certaines variations du taux de conformité peuvent s’expliquer. Par exemple, la proportion d’admissions comportant un BCM est passée de 91 % à 73 % tandis que la conformité des BCM présents dans les dossiers est passée de 59 % à 82 %. De 2017 à 2018, des efforts ont été faits pour que les BCM soient davantage conformes aux différents éléments normatifs, et le renforcement de ces exigences a pu contribuer à réduire la participation de certains cliniciens à cette démarche. Peut-on s’attendre à un taux de conformité à chaque critère de 100 %? À notre avis, le taux de conformité obtenu à chaque critère est acceptable, compte tenu du grand nombre d’intervenants (c.-à-d. plusieurs gestionnaires, > 1000 infirmières, > 400 médecins, > 40 pharmaciens, des centaines de résidents et d’étudiants en formation dans les disciplines concernées), du grand nombre d’unités de soins et de cliniques externes auditées, du grand nombre de critères applicables et du grand nombre de gestes posés (~ trois millions de doses de médicaments données chaque année au sein de notre établissement). Un seul professionnel qui manque de formation, qui a été récemment intégré ou qui est négligent peut contribuer à générer de nombreux éléments non conformes lors d’un audit, même si la majorité des intervenants respectent le cadre normatif en vigueur au quotidien.

Notre démarche repose sur la production d’un rapport ayant abouti à des recommandations personnalisées relatives à chaque unité de soins ou clinique externe. Il a été discuté avec le pharmacien répondant du secteur en question pour ensuite être transmis à l’infirmière responsable. Les recommandations ont également été discutées dans le cadre du comité pharmacie-soins infirmiers, ce qui permet de profiter de l’influence des cadres conseillers et conseillères en soins infirmiers. L’analyse finale montre que le taux de conformité à chaque critère demeure stable. Ivers et collab. ont publié en 2012 une revue systématique sur l’effet des audits suivis de rétroaction sur les pratiques professionnelles15. Les auteurs notent qu’un audit est plus efficace lorsqu’il est réalisé par un superviseur ou un collègue respecté, qu’il comporte des objectifs spécifiques et des plans d’action visant à diminuer le comportement ciblé et si le public cible n’est pas constitué de médecins. Ces trois points correspondent à notre démarche de rétroaction avec la diffusion d’un rapport personnalisé au sein de notre établissement. En revanche, d’autres points importants concernant le retour d’information à la suite d’un audit ne sont pas systématiquement réalisés, comme une rétroaction orale au personnel soignant en plus de l’envoi du rapport d’audit, la mention de l’importance du critère évalué et la mise en place d’un plan d’action. De plus, l’efficacité des audits et des rétroactions est également tributaire du degré de conformité au point de départ (c.-à-d. qu’il est plus facile de s’améliorer quand la conformité est très faible).

On peut hésiter à publier des résultats lorsque les changements sont faibles. En revanche, nous pensons que la publication de l’effort qu’a nécessité cet audit dans le circuit du médicament peut encourager d’autres établissements à faire de même. En faisant connaître ces efforts, nous pensons accroître l’intérêt et la vigilance de tous les intervenants de notre établissement pour un circuit du médicament plus sécuritaire.

En dépit de l’effet plateau observé de 2017 à 2018, nous pensons que la tenue annuelle d’un audit est essentielle et permet d’explorer de nouvelles stratégies de diffusion des résultats (p. ex. en faisant davantage participer le personnel soignant lors de la tenue de l’audit, en organisant une activité structurée sur le thème du circuit du médicament lors d’une journée de formation annuelle). L’audit perpétue une culture d’évaluation pérenne du circuit du médicament.

Cette étude comporte des limites. Bien que les critères soient explicites, leur interprétation peut varier entre les observateurs, malgré l’existence d’un outil expliquant chaque critère. Dans notre étude, les personnes qui auditent varient d’une année à l’autre. Par ailleurs, bien que l’audit soit mené sans préavis, il peut exister un biais d’observation, particulièrement lors de l’entretien avec l’assistante-infirmière-chef. D’ailleurs, l’observation directe de l’utilisation des éléments du circuit (p. ex. chariots, pompes, intranet) par le personnel soignant à l’oeuvre pourrait permettre de décrire de façon plus réaliste l’état de la conformité. De plus, l’étude repose sur un entretien avec une seule personne par unité de soins ou par clinique externe. Par conséquent, on ne peut généraliser ces résultats à l’ensemble du personnel infirmier. Toutefois, l’assistante-infirmière-chef représente la personne clé de chaque secteur, elle est censée être à jour et consciente de l’ensemble des critères de conformité et des outils à sa disposition.

CONCLUSION

Cette étude descriptive observationnelle transversale analyse la conformité du circuit du médicament dans les unités de soins et les cliniques externes. De façon globale, les taux de conformité à une majorité de critères sont restés stables aussi bien dans les unités de soins que dans les cliniques externes. Cette démarche originale à l’initiative du Département de pharmacie a mené à la formulation de 35 recommandations transmises au comité pharmacie-soins infirmiers, ce qui permet d’améliorer la sécurité du circuit du médicament dans les unités de soins et les cliniques externes.

Supplementary Information

Références

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15 Ivers N, Jamtvedt G, Flottorp S, Young JM, Odgaard-Jensen J, French SD, et al. Audit and feedback: effects on professional practice and healthcare outcomes. Cochrane Database Syst Rev. 2012;(6):CD000259.
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Amélie Chabrier, assistante de recherche, travaille avec l’Unité de recherche en pratique pharmaceutique, Département de pharmacie, Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, Montréal (Québec). Elle est aussi candidate au Pharm. D. à l’Université de Tours, à Tours (France)Pauline Rault, assistante de recherche, travaille avec l’Unité de recherche en pratique pharmaceutique, Département de pharmacie, Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, Montréal (Québec). Elle est aussi candidate au Pharm. D. à l’Université de Rennes, à Rennes (France)Suzanne Atkinson, B. Pharm., M. Sc., travaille avec l’Unité de recherche en pratique pharmaceutique, Département de pharmacie, Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, Montréal (Québec)Jean-François Bussières, B. Pharm., M. Sc., MBA, FCSHP, FOPQ, travaille avec l’Unité de recherche en pratique pharmaceutique, Département de pharmacie au Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, et la Faculté de pharmacie de l’Université de Montréal, Montréal (Québec)

Conflits d’intérêts: Aucun déclaré. ( Return to Text )


Adresse de correspondance: Jean-François Bussières, Unité de recherche en pratique pharmaceutique, Département de pharmacie, Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, 3175, chemin de la Côte Sainte-Catherine, Montréal QC H3T 1C5, Courriel:jf.bussieres@ssss.gouv.qc.ca

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Financement: Aucun reçu. ( Return to Text )


Remerciements: Les auteurs remercient le personnel soignant qui se prête annuellement à cet audit de pratique professionnelle et aussi Manon Videau et Émérentienne Vallier, pour leur participation à l’audit comme assistantes de recherche. ( Return to Text )


Canadian Journal of Hospital Pharmacy, VOLUME 73, NUMBER 2, March-April 2020