COVID-19 : Les nouveaux défis


Christine M. Bond

Alors que les deuxième et troisième vagues de COVID-19 frappent le monde entier, y compris le Canada, il est temps de réfléchir à la situation actuelle. Bien que la science ait généralement guidé les approches politiques et médicales, elle a continuellement dû rattraper le retard par rapport à l’émergence de preuves, si bien que la pratique de la médecine factuelle est devenue plus complexe que jamais1. Les recommandations relatives à l’efficacité des traitements, aux approches portant sur le confinement et la modélisation épidémiologique sont constamment révisées. Cependant, les décisions portant sur la COVID-19 ont des conséquences bien au-delà de la maladie elle-même. On ne connaîtra peut-être jamais le bilan associé aux retards de diagnostics de cancer, aux chirurgies cardiaques différées ou aux pressions exercées sur le personnel de la santé. En outre, le rapport avantages-risques comprend également des considérations politiques et économiques. Les mesures de confinement ont eu des conséquences inimaginables sur l’économie mondiale et, sur le plan individuel, ont révélé les inégalités sociales, telles que la perte d’emploi et les problèmes de santé mentale, et perturbé l’éducation d’une génération d’enfants, avec un nombre disproportionnellement élevé de personnes âgées connaissant des morbidités et une mortalité très importantes2. Compte tenu de cette complexité, il n’est pas surprenant qu’au moment de la rédaction de cet article, au début de 2021, et malgré de nombreux sacrifices, nous n’ayons pas encore surmonté la pandémie.

Pourtant, il y a de l’espoir. Santé Canada a maintenant approuvé plusieurs vaccins3, et promet la livraison de six millions de doses au total au courant du premier trimestre de 20214. Cependant, des décisions restent à prendre, comme celles portant sur les personnes qui devraient recevoir les premiers vaccins. À l’instar de nombreux autres pays, le Canada a accordé la priorité aux personnes vivant dans les établissements de soins pour personnes âgées, à celles de plus de 80 ans, suivies de celles de plus de 70 ans et celles qui travaillent dans les environnements de soins de santé. Le gouvernement a également inclus les communautés autochtones dans les personnes prioritaires. Il serait plus facile d’atteindre le taux maximal de vaccination si un plus large éventail de professionnels qualifiés administraient le vaccin, les pharmaciens communautaires par exemple, mais le Canada a tardé à communiquer un plan concret confirmant le rôle de ces fournisseurs de services.

En attendant, tous les pharmaciens peuvent jouer un rôle en maximisant l’utilisation du vaccin par d’autres moyens. Les deux tiers des Canadiens auraient déclaré qu’ils se feraient vacciner si le vaccin leur était offert5, mais un tiers attendrait ou ne le prendrait pas du tout. Ce dernier groupe comprend les opposants extrêmes aux vaccins, qui échafaudent des théories de complot, et ceux qui sont préoccupés par les potentiels effets indésirables inconnus. La politique la plus efficace consiste à mettre l’accent sur le besoin des indécis d’être rassurés plutôt que sur la conversion des opposants aux vaccins6. Les pharmaciens, en tant que professionnels de confiance, doivent rassurer le public sur la sécurité des vaccins et dissiper les mythes et la désinformation. Il n’est peut-être pas facile de convaincre les gens, mais des outils existent pour faciliter les choses7. Les pharmaciens peuvent également conseiller aux personnes qui ont eu la maladie de se faire vacciner8. De plus, une fois que les gens sont vaccinés, il faut les inciter à adhérer à un comportement responsable contre la COVID-19, soit porter un masque et respecter les mesures de distanciation physique. Ces mesures doivent se poursuivre en raison de l’immunité qui prend du temps à se développer et de l’incertitude de la transmission du virus après la vaccination. Tant que tout le monde n’aura pas été vacciné, on ne peut faire fi des infections qui continueront de se propager et des inquiétudes concernant la « durée de la COVID » et ses effets sur la population active plus jeune9.

Malgré l’optimisme engendré par le programme de vaccination, nous ne pouvons pas nous attendre à un retour rapide à la normale. Comme on pouvait s’y attendre, le virus riposte déjà par l’apparition de nouveaux variants ou de nouvelles lignées. Leur effet sur la gravité de la maladie et l’efficacité du vaccin lui-même sont deux autres aspects encore inconnus du casse-tête que représente la COVID-19. Ces développements renforcent la nécessité pour notre profession de jouer un rôle dans le contrôle de la propagation du virus en encourageant le recours au vaccin et la diffusion de messages de santé publique.

Références

1 Jackevicius CA. Une médecine fondée sur les données probantes à l’époque de la COVID-19 [éditorial]. J Can Pharm Hosp. 2021;74(1):5–6.

2 Wingert A, Pillay J, Gates M, Guitard S, Rahman S, Beck A, et al. Risk factors for severe outcomes of COVID-19: a rapid review [préimpression]. medRxiv; 1er septembre 2020 [page consultée le 11 février 2021]. [en ligne] : https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.08.27.20183434v1

3 COVID-19 vaccine tracker: how many people in Canada have received shots? CTV News; 29 décembre 2020 [page consultée le 22 janvier 2021]. [en ligne] : https://www.ctvnews.ca/health/coronavirus/coronavirus-vaccine-tracker-how-many-people-in-canada-have-received-shots-1.5247509

4 Comité consultative national de l’immunisation. Orientations sur l’administration prioritaire des premières doses du vaccin contre la COVID-19. Gouvernement du Canada; 18 décembre 2020 [page consultée le 22 janvier 2021]. [en ligne] : https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/immunisation/comite-consultatif-national-immunisation-ccni/orientations-administration-prioritaire-premieres-doses-vaccine-covid-19.html

5 Rukavina S. Majority of Canadians open to getting COVID-19 vaccine, but many want to wait, poll suggests. CBC News; 2 décembre 2020 [page consultée le 22 janvier 2021]. [en ligne] : www.cbc.ca/news/canada/montreal/majority-of-canadians-open-to-getting-covid-19-vaccine-but-many-want-to-wait-poll-suggests-1.5824067

6 Best practice guidance. How to respond to vocal vaccine deniers in public. World Health Organization; 2016 [page consultée le 12 décembre 2020]. [en ligne] : https://www.who.int/immunization/sage/meetings/2016/october/8_Best-practice-guidance-respond-vocal-vaccine-deniers-public.pdf

7 COVID-19: vaccines. Centre for Effective Practice; 2021 [page consultée le 22 janvier 2021]. [en ligne] : https://tools.cep.health/tool/covid-19-vaccines/

8 Zuber MC. Canadians who have had COVID-19 should still get the vaccine, experts say. Chronicle J. 26 janvier 2021 [page consultée le 8 février 2021]. [en ligne] : https://www.chroniclejournal.com/life/health/canadians-who-have-had-covid-19-should-still-get-the-vaccine-experts-say/article_c0759b6a-51d7-5fd7-973b-42f82f4524d2.html

9 The risk of long covid must be a primary consideration in policy decisions. BMJ Opinion. 12 janvier 2021 [page consultée le 22 janvier 2021]. [en ligne] : https://blogs.bmj.com/bmj/2021/01/12/the-risk-of-long-covid-must-be-a-primary-consideration-in-policy-decisions/


Christine M. Bond, B. Pharm., Ph. D., M. Ed., est professeure émérite, Division of Applied Health Sciences de l’Université d’Aberdeen, Foresterhill, Aberdeen, Scotland. Elle est également rédactrice adjointe au Journal canadien de la pharmacie hospitalière.


Conflits d’intérêts: Aucune déclaration. ( Return to Text )


Adresse de correspondance: Professeure Christine M. Bond, University of Aberdeen, Polwarth Building West Block, Room 1.123, Foresterhill, Aberdeen AB25 2ZD, Écosse, Courriel :c.m.bond@abdn.ac.uk

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Canadian Journal of Hospital Pharmacy, VOLUME 74, NUMBER 2, Spring 2021