La résolution du bilan comparatif des médicaments


Robert MacLaren

Le processus du bilan comparatif des médicaments comprend trois étapes intrinsèques : 1) la vérification ou la collecte des meilleurs antécédents médicamenteux possibles; 2) la clarification ou l’assurance de la pertinence de la médication et de la posologie; et 3) la résolution des divergences.1 Bien que l’objectif du bilan consiste à éviter les erreurs de médication, les buts ultimes consistent, eux, à améliorer la sécurité des patients et à réduire les complications cliniques associées aux erreurs de médication. Le bilan comparatif des médicaments est si important que l’Organisation mondiale de la Santé a élaboré un protocole de mise en œuvre standard pour faciliter son application.1

Dans ce numéro, deux études intrigantes soulignent l’importance du bilan comparatif des médicaments, mais suscitent également des questions.2,3 Dans l’une d’elles, Sanh et al.2 ont enquêté dans deux hôpitaux universitaires sur des patients âgés ayant une utilisation élevée de soins de santé et ont constaté que des prescriptions potentiellement inappropriées se produisaient chez 89 % des patients – les médicaments potentiellement inappropriés et les omissions potentielles de prescription étant courants. Les classes thérapeutiques de médicaments le plus souvent en cause étaient les anticoagulants et les antiagrégants plaquettaires, les inhibiteurs du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA), les benzodiazépines et les opioïdes. Il convient de noter que seulement 14 % des cas de prescription potentiellement inappropriée avaient été traités au moment de la sortie de l’hôpital. L’autre étude a été menée par Abu Hammour et al.3 Après le dépistage initial des divergences médicamenteuses non intentionnelles, 123 patients chirurgicaux ont reçu soit un bilan comparatif des médicaments ou des soins standard, selon une répartition aléatoire. Bien que le nombre d’écarts par patient avait tendance à être plus élevé au départ dans le groupe du bilan comparatif des médicaments, la réduction des écarts au moment de la sortie de l’hôpital était similaire entre les groupes. Ce qui est important sur le plan clinique, c’est qu’un total de 46 écarts étaient potentiellement de modérément à gravement nocifs.

Le bilan comparatif des médicaments nécessite beaucoup de ressources et est souvent rendu difficile par les problèmes sur les plans du flux de travail et de la complexité du système. Les résultats de ces deux études soulignent que la prescription potentiellement inappropriée est fréquente chez les patients hospitalisés et que les pharmaciens sont bien placés pour identifier de tels problèmes. Ces données cadrent avec la plupart des autres études.4 Ce qui pourrait surprendre le lecteur, par contre, c’est le manque de résolution des divergences dans les deux études mises en évidence, d’autant plus que les classes thérapeutiques en question étaient des médicaments à haut risque ou représentaient des résultats potentiellement nocifs. En général, cependant, la littérature manque d’informations sur l’innocuité bénéfique et les résultats cliniques associés au bilan comparatif des médicaments.4 Par conséquent, les praticiens doivent relever le défi visant à déterminer si le bilan est rentable.

Un manque d’uniformité dans les démarches utilisées pour la résolution peut expliquer l’absence de bénéfice clinique ayant fait ses preuves du bilan comparatif des médicaments. Une récente enquête randomisée multicentrique portant sur 1499 patients a démontré que le bilan comparatif des médicaments exécuté par un pharmacien, combiné à des entretiens motivationnels et à des interactions à long terme avec les prestataires, réduisait les taux de réadmission à 30 et 180 jours, alors que la révision de base des médicaments n’avait aucun impact.5 De même, dans une revue systématique de 17 études, un bilan comparatif des médicaments qui comprenait un suivi téléphonique ou des visites à domicile et des conseils aux patients a réduit les visites aux urgences et les réadmissions à l’hôpital.6 En d’autres termes, le bilan comparatif des médicaments n’améliorait les résultats que lorsqu’un processus de résolution était évident. La critique évidente qui ressort de ces données est la quantité de services intensifs qui ont été nécessaires pour optimiser la résolution. Cependant, les résultats indiqueraient que l’identification des meilleures pratiques pour le processus de résolution est impérative si les objectifs du bilan comparatif des médicaments visent à améliorer la sécurité et les résultats cliniques. Les pharmaciens font partie intégrante du bilan comparatif des médicaments, et les preuves appuient leur implication dans les étapes de vérification et de clarification. Ce qu’il faut maintenant, c’est une enquête supplémentaire sur le rôle optimal du pharmacien à l’étape de la résolution.

Références

1 The High 5s Project standard operating protocol. Assuring medication accuracy at transitions of care: medication reconciliation [en ligne]. Organisation mondiale de la Santé; [cité le 1er avril 2022]. Disponible : https://cdn.who.int/media/docs/default-source/integrated-health-services-(ihs)/psf/high5s/h5s-sop.pdf?sfvrsn=e3e53c9_4&ua=1

2 Sanh M, Holbrook A, Macdonald PDM, Lee J. Potentially inappropriate prescribing in hospitalized older adult high-cost health care users: a pilot study. Can J Hosp Pharm. 2022;75(3):219–24.

3 Abu Hammour K, Abu Farha R, Ya’acoub R, Salman Z, Basheti I. Impact of pharmacist-directed medication reconciliation in reducing medication discrepancies: a randomized controlled trial. Can J Hosp Pharm. 2022;75(3):169–77.

4 Redmond P, Grimes TC, McDonnell R, Boland F, Hughes C, Fahey T. Impact of medication reconciliation for improving transitions of care. Cochrane Database Syst Rev. 2018;23:CD010791.

5 Ravn-Nielsen LV, Duckert ML, Lund ML, Henriksen JP, Nielsen ML, Eriksen CS, et al. Effect of an in-hospital multifaceted clinical pharmacist intervention on the risk of readmission: a randomized clinical trial. JAMA Intern Med. 2018;178(3):375–82.
Crossref  PubMed  PMC  

6 Mekonnen AB, McLachlan AJ, Brien JA. Effectiveness of pharmacist-led medication reconciliation programmes on clinical outcomes at hospital transitions: a systematic review and meta-analysis. BMJ Open. 2016;6:e010003.
Crossref  PubMed  PMC  


Conflits d’intérêts : Aucune déclaration. ( Return to Text )


Adresse de correspondance : Dr Robert MacLaren, Department of Clinical Pharmacy, Skaggs School of Pharmacy and Pharmaceutical Sciences University of Colorado, 12850 E Montview Boulevard, Aurora CO 80045 USA, Courriel :rob.maclaren@cuanschutz.edu

(Return to Top)


Canadian Journal of Hospital Pharmacy, VOLUME 75, NUMBER 3, Summer 2022